Apéruche VizThink : datajournalisme et outils de visualisation
jeudi, 26 janvier 2012 par Regis
Bug et la communauté VizThink France proposaient ce mercredi 25 janvier un atelier Vizthink à la Cantine numérique rennaise. Un peu plus de vingt personnes avaient répondu présent, des journalistes, des fonctionnaires territoriaux, des chercheurs, des entrepreneurs, des étudiants… des personnes déjà au fait de la notion de VizThink.
En introduction, Philippe Mc Clenahan présente le projet VizThink français, dont dont il fut l’initiateur à Rennes, lancé dans le cadre des apéruches en 2010. Aujourd’hui, des communautés se créent à Paris, Lille, Toulouse et Aix en Provence, chacune avec ses spécificités. Alors que Rennes est très orienté infographie et data-visualisation, Toulouse est plus tournée vers le « design thinking ». A Aix en Provence, Philippe Mc Clenahan envisage de travailler avec des chorégraphes en danse contemporaine, spécialistes du sketching : chacune de leur chorégraphie étant d’abord posée sur le papier, mise en image plutôt qu’en mots. VizThink est une communauté informelle, sans statut associatif, non-commerciale, l’idée est d’échanger et de réunir des participants motivés par la réflexion sur cette forme innovante de « pensée par l’image » qu’est le VizThink.
A Rennes, nous avons la chance d’avoir des personnes qui se bougent, tentent et travaillent à des nouveaux projets : Jean Abbiateci est de ceux là. Celui que l’on avait déjà invité pour nous présenter son webdoc Africascopie, était cette fois convié pour ses travaux de datajournalisme, visibles sur le site data-projet.com. « Le datajournalisme, on en parle beaucoup, et il y a finalement peu de travaux disponibles en France », c’est pourquoi Jean Abbiateci s’est lancé dans la création d’outils de visualisation. Le premier en date était un système de visualisation de la ventilation du budget de l’état, avec des comparaisons sur cinq ans. Le projet qui n’est pas sans rappeler le projet d’arbre de la dépense publique (tax tree) qui avait remporté en 2010 le concours Apps for democracy en Finlande, propose un graphique représentant les dépenses de l’état poste par poste, sur une infographie interactive où la taille de chaque rectangle est proportionnelle au montant des crédits alloués.
Data.gouv n’était pas en ligne lorsqu’il a fallu réunir les chiffres du budget de l’état, Jean Abbiateci s’est donc tourné vers le portail Performance-public. En compulsant une centaine de pdf, à la main, en allant chercher le chiffre utile dans chaque tableau, il a pu constituer un gros fichier excel sur quatre ans de dépenses, par postes et sous postes. Il nous explique que ça n’aurait pas été plus simple avec le portail data.gouv, sur lequel des milliers de fichiers ont été déposés sans médiation ni explication, la représentation des comptes étant différente d’un tableau à l’autre : « à refaire aujourd’hui j’utiliserais à nouveau Performance-publique ».
Au moyen d’une librairie javascript disponible en ligne et de l’api charts de Google pour générer des graphiques. « Avec un peu de connaissance html et css, ce n’est pas trop compliqué », Jean Abbiateci rend intelligible le budget de l’état sur une infographie interactive et visuellement pertinente. « Par exemple, on mesure bien l’importance de la dette, la faiblesse relative du budget consacré à la culture ou à la justice ». Les évolutions sur cinq ans donnent une idée des orientations politiques postes par poste.
Un travail réalisé à titre personnel, en quatre jours, qui comme le dit Jean Abbiateci, serait certainement perfectible en y consacrant plus de temps, mais dont la qualité est indéniable. Sur le site data-projet.com, on retrouve également la carte « où vivent les riches ? », où l’on découvre que la commune de Oyonnax compte un nombre important d’imposables à l’ISF. Une carte qui « permet de sortir des idées toutes faites et de traiter l’info un peu différemment, on ira peut-être enquêter à Oyonnax pour changer de Neuilly ou du 16ème« .
Un participant, journaliste, pose la question du coût et du financement : combien coûte un data-journaliste ? Quel budget pour une enquête de data-journalisme ? Qui est-ce que ça intéresse ? Est-ce que cela intéressera réellement le lectorat sur le long terme ? Ces rencontres où tout le public est convaincu ne sont-elles pas trop biaisées, comment aller convaincre ceux qui en fréquentent pas ateliers VizThink ou les rencontres HackThePress ? Autant de question pertinentes auxquelles il n’y a d’autre réponse que celle de continuer à créer des outils pertinent, afin qu’ils deviennent une évidence, pour le public comme pour les rédactions.
Dans l’ensemble, et en conclusion, Jean Abbatieci nous dit qu’il « faut un appétit de journaliste pour bien attaquer la donnée : les journalistes l’ont, les informaticiens l’ont, les graphistes souvent moins« , la question est « on a une info, comment on fait pour la traiter : peu importe la manière de la traiter, c’est ce qu’on va réussir à en tirer qui est intéressant ».
Atelier et non conférence, le rendez-vous est l’occasion de présenter des projets en cours, de soumettre des idées et trouver ensemble des solutions. Richard de Logu présente un projet de visualisation de la cartographie sociale des musiciens rennais sur 30 à 40 ans, créer un outil interactif, sur le modèle de SeattleBandMap (mais en beaucoup plus léger) pour naviguer d’un groupe à l’autre par les musiciens qui le compose. L’intérêt est de repérer les musiciens où les groupes pivots qui ont fait l’histoire des musiques actuelles à Rennes. Une cartographie sociale, des fiches modifiables couplées avec le Wiki-Rennes (sur lequel on trouve déjà 190 groupes ou artistes locaux), des vidéos et du son pour voyager dans les musiques actuelles. Les participants à l’atelier rebondissent, l’exemple de la base de données des Trans Musicales est donné : ce projet ne se restreint pas aux Trans. « Pourquoi ne pas ajouter les lieux de concerts pour repérer les lieux qui ont fait l’histoire ? » : solution écartée, il faut une entrée, pas deux pour que le projet soit accessible et pertinent. Quid du travail de recherche ? Le Wiki-Rennes sera la base du travail documentaire, les acteurs locaux des ressources musicales seront impliqués, un projet global autour de la visualisation, complètement en accord avec la philosophie des ateliers VizThink.
Dernier sujet abordé, la réflexion sur la création d’une typologie des services de consommation collaborative. Suite aux deux apéruches consacrés au sujet en moins d’un an, l’idée de créer une typologie des différents services dits de consommation collaborative est née. Un récent édito de Hubert Guillaud sur InternetActu a été l’occasion de se lancer. En effet, ces services sont souvent traités également dans l’analyse, quand ceux-ci ne sont pas tous équivalents : quel rapport entre une personnes qui prête son canapé à une autre, qu’il ne connaît pas à l’avance, à qui il ne demande aucune participation financière, avec qui il partage un peu de de son temps, et une autre qui loue ce même canapé 50 euros la nuit à une autre qu’il ne verra pas nécessairement. Peu si ce n’est que les deux services, couchsurfing et AirBNB sont considérés comme formant part du mouvement de la « consommation collaborative ». Une réflexion est en cours sur la manière dont on pourrait créer une typologie, selon les aspirations des consommateurs, et des « producteurs », afin non pas de dire que l’un est bon, l’autre est mauvais, mais de ne plus les traiter exactement sur le même plan. Représenter des services différents en fonction de critères eux-mêmes très différents : un casse-tête qu’il était intéressant de partager et dont les résultats seront bientôt partagés sur ce même blog.
Au final, deux heures d’ateliers, presque trop peu tant chaque sujet était l’occasion d’échanges passionnés et passionnants. Un atelier qui en appelle un autre, dans deux mois, toujours à la Cantine numérique.
No. 1 — vendredi, 27 janvier 2012 à 3 h 00 min
[…] En introduction, Philippe Mc Clenahan présente le projet VizThink français, dont dont il fut l’initiateur à Rennes, lancé dans le cadre des apéruches en 2010. Aujourd’hui, des communautés se créent à Paris, Lille, Toulouse et Aix en Provence, chacune avec ses spécificités. Alors que Rennes est très orienté infographie et data-visualisation, Toulouse est plus tournée vers le « design thinking ». A Aix en Provence, Philippe Mc Clenahan envisage de travailler avec des chorégraphes en danse contemporaine, spécialistes du sketching : chacune de leur chorégraphie étant d’abord posée sur le papier, mise en image plutôt qu’en mots. VizThink est une communauté informelle, sans statut associatif, non-commerciale, l’idée est d’échanger et de réunir des participants motivés par la réflexion sur cette forme innovante de « pensée par l’image » qu’est le VizThink. Apéruche VizThink : datajournalisme et outils de visualisation | Le blog de l'association BUG – R… […]