Atelier : visualisons la donnée financière associative
jeudi, 30 juin 2011 par Regis
Jeudi 29 et vendredi 30 juin, Bug participe à l’atelier co-conception « visualisons l’information rennaise » à La Cantine Numérique Rennaise, animé par Christophe Cariou (Everydatalab). L’objectif de ces deux journées est de réfléchir, expérimenter et réaliser des valorisations possibles des données libérées par Rennes Métropole sous la forme de visualisations d’informations.
Nous n’arrivons pas les mains dans les poches, mais avec un projet à finaliser : rendre intelligible les données financières du domaine associatif, libérées par la ville de Rennes au printemps, et pour le moment peu exploitées. Parmi ces données, des fichiers excel principalement : on retrouve les subventions aux associations, subventions de fonctionnement et subventions exceptionnelles.
Notre idée est d’évaluer l’engagement de la ville dans le le secteur associatif, le comparer à celui de villes de même taille, d’analyser l’engagement par secteur, par quartier, établir des comparatifs réels entres associations locales. Nous savons déjà que tout ne sera pas réalisable en deux jours : cet atelier marque le départ d’un projet qui se poursuivra ensuite.
Objectif 1 : comparaison par ville
Nous arrivons en force, pas moins de cinq buggers ont fait le déplacement, on retrouve parmi les participants des élèves ingénieurs de Telecom Bretagne, des développeurs, des étudiants à science-po, des associatifs, etc.. Après une première phase de présentation de l’atelier par Christophe Cariou, de leur projet par Telecom Bretagne et Sylvain Hellegouarch, nous nous lançons dans le travail.
Notre premier objectif est d’établir une comparaison entre différentes villes, quant à leur engagement dans le secteur associatif. Nous choisissons Brest, Nantes, et Nice. Aucun problème pour trouver les données macros des deux premières, nous ne trouvons pas grand chose sur Nice, il faut visionner une vidéo pour entendre Christian Estrosi donner le montant de son budget global, il sera par contre impossible de trouver des données sur le montant alloué aux associations. Nous tentons Montpellier, pas mieux. Le comparatif ne portera donc que sur trois villes.
Deuxième écueil, la ventilation du budget, un premier survol nous donne des résultats déséquilibrés en faveur de à Rennes, qui obtient des résultats beaucoup plus élevés que ses voisines de l’ouest. Rennes consacrerait 183 euros par habitants aux associations, quand Nantes en consacrerait seulement 63,9 et Brest 51,2. Des résultats étonnants, qui nous mènent à pousser plus loin l’analyse.
Le fait de disposer des données financières de Rennes nous permet de connaître la ventilation des subventions, et surtout les acteurs vers lesquelles elles se dirigent. Or, chaque ville a son mode fonctionnement propre, quand Rennes subventionne le secteur culturel sur la ligne de budget asso, Nantes passe sur une ligne de budget culture. Par exemple, on se retrouve donc avec des subventions importantes données à des Sociétés d’économie mixtes, comme le Théâtre national de Bretagne ou Rennes ou Cité Média (TV Rennes), augmentant « artificiellement » l’enveloppe globale, quand une ville équivalente comme Nantes finance des activités similaires sur d’autres lignes de budget. Le comparatif est donc biaisé.
Afin de produire une analyse comparative, nous nous référons donc au budget de la « vie associative » de ces trois villes : nous obtenons des résultats plus comparables, 49,7€ pour Rennes, 35,1€ pour Nantes, et 51,2€ pour Brest. Ces résultats, plus plausibles, ne sont encore suffisamment pertinents. La comparaison réelle entre ville ne pourrait se faire que si nous disposions pour ces trois villes des données financières ouvertes, plus complètes, comme c’est le cas pour Rennes. Il faudrait encore leur ajouter le niveau d’intégration à la métropole de chacune des ces villes, savoir quelles compétences ont été transférées à l’agglomération pour chacune. Enfin, un paramètre important manque également, le nombre total d’associations soutenues par ces trois villes.
Objectif 2 : établir un comparatif entre associations locales
A partir des données rennaises, nous souhaitons établir une visualisation de la subvention de quelques associations locales. Ce canevas d’analyse doit permettre d’être étendu par la suite à toutes les associations, que nous classerons par secteur d’activité et par emprise territoriale. Ceci à terme nous donnera une vision globale de la dépense publique et de ses bénéfices sur le territoire, ainsi que les emplois directs induits.
Nous partons donc sur une vingtaine d’associations, parmi les plus importantes, dans divers secteurs. Nous disposons des subventions de fonctionnement, des subventions exceptionnelles. C’est là que le travail commence : partir à la chasse pour compléter le jeu de données dont nous disposons :
– obtenir les équivalents en loyer et charges des bureaux mis à disposition par la ville,
– obtenir le budget global de chaque asso,
– la part de la subvention publique, rennaise et non rennaise,
– le nombre d’emplois en équivalent temps plein,
– l’emprise géographique de l’association,
– le secteur d’activité,
Nous le savions déjà, cela se confirme, la donnée n’a de sens que si elle est retravaillée, enrichie et croisée. Le datajournalisme n’est pas un mythe, la data est un point de départ, le travail de journalisme d’investigation est ce qui doit le compléter.
Afin de récupérer ces données, deux solutions :
– appeler une par une chaque association pour demander les chiffres, un travail de fourmi qui ne produira pas de résultats complets : risque de refus.
– se tourner vers l’acteur public local : toutes ces données existent, à la direction des affaires financières. Ce sont des données publiques, consultables, donc ouvrables mais le mieux serait cependant que les associations proposent elles-mêmes de participer à ce travail. Une prochaine étape pourrait par conséquent de communiquer en direction du monde associatif cette expérience afin de collecter sur le mode contributif le jeu de données manquant.
De la même manière, l’opendata doit se propager aux autres villes, la comparaison entre territoires doit se faire sur des bases objectives et analogues. Cela évite tout fantasme, positif ou négatif, et une meilleure transparence de la dépense publique.
Technique
Nous avons au cours de ces deux journée testé un bon nombre d’outils permettant sur le papier d’extraire des visualisations d’un jeu de données : ils s’avèrent tous sans distinction trop complexes à mettre en oeuvre : www.impure.com est incompréhensible pour un béotien, idem pour Gephi, ces deux logiciels sont en revanche très adaptés à l’analyse de très gros fichiers (graphes sociaux). Nous nous intéressons alors à des projets plus accessibles : Many eyes et Tableau Public mais là encore, nous manquons de pratique et notre jeu de données est trop peu fourni pour une visualisation suffisamment spectaculaire. Finalement, nous choisissons le logiciel d’exploitation Numbers (mac os) assez versatile.
Nous poursuivrons ce travail dans les semaines à venir.
[EDIT] A noter l’excellent article de Jesse Lichtenstein, paru dans le Wired édition américaine de ce mois, « Transparency for all ». Ses conclusions sont analogues, et les effets pervers sont clairement exposés, aux acteurs du développement de livrer entre les mains du public les outils d’analyse de données convaincants.
No. 1 — vendredi, 8 juillet 2011 à 4 h 47 min
Je trouve ce type d’initiative et de billets très utiles car ils permettent :
– de porter un regard critique débouchant sur des propositions d’amélioration de la structuration des données publiques locales à des fins de transparence et de prise de décision
– de pointer du doigt l’importance de partager ce processus avec les acteurs eux-même (ici les autres associations) et non de l’initier du haut vers le bas
– d’attaquer le nécessaire chantier de l’intelligibilité de la donnée qui seule ne « parle pas », pour en faire un outil au service du débat public local
Le tout par l’action (ici l’atelier).
Yo !
H.
No. 2 — mardi, 9 août 2011 à 0 h 38 min
Ouf ! Enfin un peu de sérieux et de réalisme. Cela nous change de l’enthousiasme naïf de la majorité des discours sur l’opendata.
Au-delà des chiffres, dont vous soulignez les difficultés de comparabilité, l’intérêt de votre travail est avant tout de montrer les différences de stratégies d’affichage et de contrôle des sommes redistribuées (associations, SEM, etc.).
Je m’interroge sur votre affirmation concernant la nécessité de réaliser « une visualisation suffisamment spectaculaire ». Il me semble qu’une visualisation doit avant tout faciliter une lecture correcte des résultats. Or la plupart des visualisations sont avant tout spectaculaires par la méconnaissance des règles élémentaires de sémiologie graphique qu’elles révèlent. Utiliser des logiciels spécialisés sans connaître ces règles, c’est utiliser un traitement de texte sans connaître l’orthographe, la grammaire ou la syntaxe (qui plus est sans correcteur intégré !).
À propos de votre graphique, voici quelques remarques :
A priori la surface de chaque camembert est proportionnelle au budget respectif de chaque ville (en haut à droite). Or on ne dispose d’aucune échelle pour avoir une idée des montants de ces budgets. D’autre part la légende est mêlée aux libellés des villes, et elle est inexacte : la couleur bleue ne représente pas le budget global, mais le budget global moins le budget consacré à la vie associative.
Si l’effet 3D n’est pas gênant (mais qu’apporte-t-il en plus ?) sur les camemberts, il fausse considérablement la lecture de l’histogramme en bas à droite. Visuellement la différence entre Rennes et Brest est supérieure à la réalité. Le choix des intervalles de l’axe des ordonnées n’est pas optimal, il aurait ici été préférable d’utiliser un intervalle permettant d’afficher la valeur 50 (proche des valeurs observées pour Rennes et Brest). On peut par ailleurs supposer que l’unité utilisée est l’euro mais elle n’est pas précisée.
Plus généralement, les mêmes couleurs sont utilisées pour représenter des informations différentes dans les trois graphiques.
Pour finir sur une note humoristique…
Certains seront ravis que vous considériez Nantes comme une ville bretonne, d’autres un peu moins !
L’ombre massive sous la ville de Brest dans l’histogramme traduit-il l’ensoleillement observable ces jours-ci dans cette belle ville ? Sinon quelle information apporte cette ombre ?
Ne voyez dans ces remarques qu’une marque d’intérêt et de bienveillance, je vous félicite en effet pour la qualité de votre travail, la rigueur de votre démarche et l’honnêteté de votre restitution.
No. 3 — lundi, 22 août 2011 à 7 h 34 min
Bonjour,
Merci pour votre commentaire.
Nous sommes d’accord sur le fait que le graphique est largement perfectible. Ce n’est d’ailleurs pas le plus intéressant dans cet article qui pourtant traite de la visualisation..
Sur le côté spectaculaire, c’est vrai que l’efficacité, donc la lisibilité, prime.
Sur Nantes, en relisant l’article, je ne crois pas que nous l’ayons considérée à aucun moment comme Bretonne. Tout au plus comme ville de l’ouest. 😉
No. 4 — lundi, 10 octobre 2011 à 14 h 41 min
Bonjour,
Comment a avancé le projet ? Sur Nantes on attend les données…
No. 5 — lundi, 10 octobre 2011 à 23 h 16 min
[…] Le 21 septembre 2011 avait lieu à La Cantine numérique, la 2ième soirée VizThink Rennes animée par Richard Delogu, consacrée à l’exploitation libre des données publiques numériques mises à disposition par Rennes. Un deuxième rendez-vous après l’atelier Visualisons Rennes, tenu au mois de juin dernier, dont voici le compte-rendu. […]
No. 6 — mercredi, 18 janvier 2012 à 8 h 59 min
[…] Nous sommes revenus rapidement sur l’atelier de visualisation des données, organisé en juin 2011 à la Cantine par Everydatalab. Tous les projets lancés sont visibles sur le site Visualisons Rennes, l’association Bug a également rédigé un compte-rendu de cet atelier. […]
No. 7 — jeudi, 26 janvier 2012 à 0 h 02 min
[…] Atelier : visualisons la donnée financière associative | Le blog de l'association BUG – Rennes Jeudi 29 et vendredi 30 juin, Bug participe à l’atelier co-conception « visualisons l’information rennaise » à La Cantine Numérique Rennaise , animé par Christophe Cariou ( Everydatalab ). L’objectif de ces deux journées est de réfléchir, expérimenter et réaliser des valorisations possibles des données libérées par Rennes Métropole sous la forme de visualisations d’informations. […]
No. 8 — vendredi, 1 juin 2012 à 6 h 34 min
[…] avec le nom d’une association, un montant, un numéro de délibération. Comme l’a montré l’expérience menée par Bug , cette donnée ne nous permet de mesurer le soutien de la ville au secteur associatif, ni de […]